CRITIQUE | SERIE

SEVERANCE S2 : métro, boulot, déco

Critique | Depuis quelques jours, le final de la saison 2 de Severance, le projet phare d’Apple TV+, continue de résonner dans nos esprits. Et ce n’est pas pour rien qu’on parle de meilleure série de science-fiction, car depuis, la plateforme connaît une forte croissance.

SYNOPSIS


Que se passerait-il si vous pouviez diviser votre vie en deux mondes distincts : l’un professionnel, l’autre personnel ? C’est ce que propose Lumon Industries, une société qui a mis au point un programme révolutionnaire permettant d’établir cet équilibre par le procédé de la dissociation.

© Severance

Mark Scout a choisi cette solution pour effacer un passé tragique. Aujourd’hui, il est responsable d’une équipe dédiée aux archives, composée d’Irving, Dylan George et Helly B. Aucun d’entre eux ne connaît la vie des autres en dehors de ce service de macro-données. Pourtant, ces employés, surnommés « inters« , commencent à se poser de plus en plus de questions sur leurs vies de « exters ». Dans la deuxième saison, Mark et ses collègues découvrent à leurs dépens les conséquences désastreuses d’une mauvaise manipulation de dissociation.

NOTRE CRITIQUE

La fin de la saison 1 nous a laissés en suspens, et ce, depuis 2022.. Deux ans après, on se prépare enfin à déguster chaque vendredi la suite des aventures de notre équipe d’inter au service des macro-données. La claque se prolonge, et en fait la série la plus visionnée sur la plateforme Apple Tv+.

Et même si le sujet est purement fictif, il fait écho à des réalités bien concrètes, notamment le besoin d’équilibrer travail et vie personnelle –thème central de la série, d’autant plus pertinent dans un monde post-Covid où ces questions sont plus que jamais au cœur des débats. Severance s’empare de cette problématique à travers une dystopie assumée, où ce qui semble être une solution idéale (plus de stress à la maison) révèle rapidement ses limites et devient une menace insidieuse. Les employés, ou du moins une version fragmentée d’eux-mêmes, sont transformés en cobayes parfaits : hyper-productifs, déshumanisés, piégés dans un cycle sans fin où le travail finit toujours par prendre le dessus, érodant le peu d’humanité des inters. La dissociation n’est alors qu’une illusion, un faux équilibre qui ne fait que mener à des dérives plus profondes. Mais cette saison 2 peine à maintenir un équilibre d’ensemble, malgré une ouverture percutante en plan-séquence qui pose les bases d’une dynamique intense. Rapidement, elle se heurte à des freins narratifs et des longueurs qui étirent le développement de certaines intrigues sans offrir de réelles avancées. L’épisode inaugural, pièce tant attendue du puzzle, semble répondre au cliffhanger de la saison précédente, mais les épisodes suivants s’emploient davantage à densifier un univers déjà riche qu’à véritablement faire progresser l’intrigue.

© Severance

Pourtant, Severance parvient toujours à se réinventer, portée par la richesse de son univers et de ses idées. Elle joue habilement avec la temporalité, s’aventurant dans un passé révélateur du deuil de Mark (épisode 7), ou exploitant le cadre géographique labyrinthique du service des macro-données (épisode 4), renforçant ainsi l’aspect oppressant de Lumon. La série étoffe également le personnage de Mrs. Cobel, insaisissable et ambivalente, ni véritable protagoniste ni antagoniste, illustrant toute la subtilité de Severance, où chacun agit selon ses propres intérêts ou ceux de son inter. Des séquences plus légères et comiques viennent aérer le récit, mais au-delà de l’expansion d’un univers dont on maîtrise déjà les codes, la saison peine à insuffler un véritable renouveau narratif. L’équilibre entre approfondissement et progression semble vaciller, laissant parfois une impression de surplace. On poursuit toujours l’exploration de cette quête identitaire et de la vision unique des rapports humains que la série dépeint : qui sommes-nous vraiment ?

© Severance

L’inter, représentant cette facette inconsciente de nous-mêmes, incarne-t-il une partie de ce que nous ne nous permettons pas d’exprimer, englouti dans le tourbillon du travail ? Les interrogations des exter vis-à-vis de leurs inters, et inversement, ne seraient-elles pas le reflet de notre propre rapport aux « nous » et à la « conscience » ? Une discussion qui semble pourtant presque impossible à résoudre dans cette seconde saison, ces thématiques prennent de l’ampleur, s’élargissant à la souffrance, au clonage, aux conséquences des souvenirs, tout en introduisant un triangle amoureux qu’on entrevoyait déjà à l’horizon. Cette réalité, dense et troublante, est portée par une photographie qui oscille entre des teintes froides et impersonnelles, puis se teinte de sombres nuances vers la fin de la saison. Le style symétrique, déjà bien ancré depuis les neuf premiers épisodes, continue de renforcer les motifs d’enfermement, d’isolement et de déshumanisation, plongeant les personnages dans une atmosphère oppressante et inéluctable.

Le final laisse une nouvelle fois cette frustration d’une intrigue suspendue en plein élan, avec un cliffhanger qui nous prend littéralement par surprise. On se retrouve déjà à compter les jours avant le retour de Severance, prêts à plonger à nouveau dans cet univers fascinant.

À retrouver sur Apple TV +

EN DEUX MOTS

Une deuxième saison qui maintient son essence en s’insérant davantage dans son concept de dissociation. Malgré un rythme inégal et quelques moments de surplace, l’ensemble reste une dystopie angoissante et attractive, portée par un final percutant.

3,5

Note : 3.5 sur 5.


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