CRITIQUE | FILM

CHIEN 51 : Jimenez aboie, mais ne mord pas

Critique | Après les succès retentissants de BAC Nord et Novembre, Cédric Jimenez, cinéaste français amoureux de polar, repasse derrière la caméra pour faire ce qu’il fait de mieux. Avec la même équipe de comédiens (qui occupe nos écrans depuis plusieurs années), il donne vie à l’adaptation du roman dystopique Chien 51 de Laurent Gaudé, paru en 2022.

SYNOPSIS

En 2045, Paris est désormais fragmentée en zones strictement hiérarchisées selon les classes sociales. La zone 1, correspondant au centre de la capitale, est réservée à l’élite. La zone 2 regroupe les classes aisées, tandis que la zone 3, dont les limites restent floues, au-delà de Paris, abrite les plus démunis. L’ensemble de la population vit sous la surveillance d’Alma, une intelligence artificielle chargée d’assister la police dans ses enquêtes.

© Chien 51

Lorsque Georges Kessel, le créateur d’Alma, est retrouvé assassiné, les soupçons se portent aussitôt sur Jon Mafram, chef du groupe anarchiste Breakwalls et farouche opposant au système. L’enquête est confiée à Salia Malberg, inspectrice d’élite de la zone 2, et à Zem Brecht, policier désabusé issu de la zone 3. Tout les oppose, mais ils devront unir leurs forces pour faire éclater la vérité. Leur investigation les conduira rapidement à une conspiration d’envergure, capable de bouleverser l’ordre établi.

NOTRE CRITIQUE

Chien 51 est un projet français ambitieux qui place Adèle Exarchopoulos et Gilles Lellouche au cœur d’un Paris dystopique, fracturé entre classes sociales où l’intelligence artificielle semble dominer les consciences. Le genre de cinéma qui se fait de plus en plus rare, après les crash spectaculaires de nombreuses productions de la même trempe. Des sociétés comme EuropaCorp, présidée par nul autre que Luc Besson, en ont déjà fait les frais.

Et à en juger par les résultats décevants de Chien 51 au box-office, la malédiction frappe encore, malgré un casting devenu marque de succès plutôt que présence de jeu. Un accueil critique plutôt tiède, mais il faut reconnaître que l’on éprouve une certaine sympathie pour ce long-métrage. S’il peine à parler correctement d’un sujet qu’il ne maîtrise pas, il a au moins le mérite de divertir le temps de ses deux heures. Chien 51 s’impose comme un film d’action nerveux, prenant et percutant, servi à la sauce Cedric Jimenez qui ne perd jamais de son efficacité. Le rythme soutenu ne laisse aucune place à l’ennui dans la salle de cinéma. Les péripéties de cette chasse à l’homme s’enchaînent avec une grande intensité, malmenant les personnages sans jamais leur accorder de véritable répit. L’occasion aussi de filmer de jolis décors et d’y introduire de bons moments d’effets visuels. La séquence de la boîte de nuit est magnifiée par la photographie et un jeu de lumières très en vogue dans le cinéma d’action actuel, par exemple. Bref, les bouffeurs de divertissement y trouveront donc leur compte. En revanche, inutile d’y chercher une réflexion sur l’intelligence artificielle ou ses dérives. Sur ce point, Chien 51 n’apporte rien nouveau. Mais peut-on vraiment le lui reprocher vu le nombre de tentatives ratées ces derniers temps ?

© Chien 51

Autrement, le scénario ne nous épargne pas les clichés et les caricatures de ses protagonistes. En cherchant à se donner un vernis politique et un message engagé, Chien 51 se perd dans une proposition qui manque de radicalité, et qui tombe comme un cheveu dans la soupe. La direction d’acteurs, quant à elle, n’est pas totalement au rendez-vous non plus, et ce n’est pas nouveau avec ces comédiens-là qui ne cessent de se reposer sur leurs lauriers. Louis Garrel fait du Garrel, et Adèle Exarchopoulos fait du Exarchopoulos. Impossible de distinguer les personnages du récit tant les jeux sont d’une pale monotonie. Gilles Lellouche, comme à son habitude, parvient à relever un peu le niveau, mais c’est finalement Artus, malgré un temps d’écran limité, qui tire le mieux son épingle du jeu. Quand arriveront-ils à engager ces acteurs et actrices pour jouer des personnages ? On se le demande. Pour le moment, il ne s’agit ni plus ni moins que d’une énième prise d’otage du cinéma français par les mêmes personnes que l’on voit en boucle. Peut-être que le désintérêt du public tient aussi à cela : comment créer l’événement quand on revoit, jour après jour, les mêmes acteurs dans les mêmes registres ? On passera vite sur la romance catastrophique entre Exarchopoulos et Lellouche. Gênante à l’écran, inutile dans le récit. Donnez-nous de la nouveauté.

EN DEUX MOTS

Loin d’être la catastrophe que la critique détruit, Chien 51 reste un divertissement nerveux et efficace, porté par la mise en scène sous tension de Cédric Jimenez. On regrette cependant le manque de parti pris flagrant et une utilisation de l’intelligence artificielle toujours plus cliché. 

3

Note : 3 sur 5.


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(1 commentaire)

  1. Pas catastrophique en effet, mais extrêmement décevant au regard du potentiel offert par le roman. Le choix très opportuniste mettre l’IA dans la boucle est finalement une erreur. N’est pas Mission Impossible qui veut. Et il y avait tant à dire sur la prise de pouvoir par les grandes multinationales.
    Les acteurs principaux font le job, y compris Adèle qui pour moi est un des plus beaux personnages. Je suis moins convaincu par Artus dans son rôle de capitaine de police à bout de nerfs. Mais il est tellement peu à l’écran qu’il force son jeu pour exister. Le Mafram aux mille visages confié à Garrel manque au contraire d’envergure et d’originalité.

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