CRITIQUE | FILM

DES FEUX DANS LA PLAINE : jusqu’à se consumer

Critique | Après plusieurs années en tant que directeur de la photographie, expérience qui visiblement ne lui a pas été inutile, le cinéaste chinois Ji Zhang signe son premier long-métrage. Un polar noir, ancré dans une Chine imprégnée de fatalisme : sur le papier, tout était réuni pour convaincre…

SYNOPSIS

Alors qu’il enquête sur une série de meurtres visant des chauffeurs de taxi, l’inspecteur Zhuang Shu se retrouve confronté à une ancienne affaire : la mort d’un policier qu’il avait connu huit ans plus tôt. Cette double investigation le mène à retrouver Li Fei, son amour de jeunesse, avec qui il a grandi. Il découvre alors qu’elle est liée à l’affaire et pourrait même en avoir été témoin.

© Des Feux dans la Plaine

Des feux dans la plaine est un thriller policier chinois réalisé par Zhang Ji, sorti en 2021. Le film est adapté du roman éponyme de Shang Xue-tao.

NOTRE CRITIQUE

La bande-annonce promettait un polar asphyxiant. Elle ne ment pas totalement, mais Des Feux Dans La Plaine cache bien son jeu. Un film policier peut en dissimuler un autre, et c’est justement ce mélange inattendu entre romance désabusé et enquête policière qui fait tout son charme.

D’autant que l’investigation est presque aussi vite expédiée qu’elle n’est lancée. De quoi dérouter les spectateurs les moins réceptifs aux changements de cap, dans un récit où l’on connaît déjà le coupable. Car ce qui importe ici, ce n’est ni la poursuite, ni la vérité, ni même la justice, mais bien les conséquences. Chaque personnage voit sa vie bouleversée après cet acte fatidique, presque comme un coup du sort. Une réaction en chaîne qui redéfinit leur place dans la société, et provoque une remise en question profonde de chacun. Un vrai pas de côté, dans un film qui interroge autant qu’il fascine, porté par la mise en scène solide du réalisateur chinois Ji Zhang. Et pourtant, il ne s’agit que de son tout premier projet derrière la caméra, mais on aurait pu deviner, cela dit, qu’il avait déjà un certain goût pour l’image et surtout la photographie. Car Des Feux Dans La Plaine ne lésine pas sur les plans ultra-stylisés, où les flammes se mêlent aux zones d’ombre de la situation. Le réalisateur dépeint une Chine grise, étouffée par l’insalubrité de ses bâtiments décrépis. Un cadre parfait pour son histoire, avec le décor d’un thriller et le brasier d’une passion en son cœur. Une représentation presque évidente de cette romance incertaine, qui tente de survivre au cœur du chaos.

© Des Feux dans la Plaine

Découpé sans grande subtilité en deux parties distinctes, Des Feux Dans La Plaine s’échappe aussi des stéréotypes du genre dès ses premières minutes. Le personnage principal n’est même pas celui qu’on croit, et l’intrigue s’efface peu à peu, laissant timidement place à autre chose.. Bien loin de ce qu’un spectateur avide de meurtres et de frissons criminels était venu chercher finalement. Tout en douceur, mais jamais sans personnalité, le film impose ses thèmes principaux : la crise économique en Chine, le poids des regrets, la fatalité, le destin. On mélange tout ça dans un bon bol de nouille brûlante et on obtient un long-métrage touchant et aux résonances profondes. Dans ce nouveau projet chinois, il y a de l’intime à chaque coin de rue, et cette relation qui se déploie magnifiquement dans les dernières séquences est le fruit d’une ambiance patiemment installée par Ji Zhang. Sans avoir recours à des artifices ostentatoires, c’est par les silences, les regards et des dialogues tout en retenue qu’il réalise ce petit exploit.

Oui, Des Feux Dans La Plaine peine à franchir le cap de l’excellence, et à dépasser le statut d’objet cinématographique stylisé, le cul entre deux chaises de la romance et du polar. Il traîne les petits défauts typiques d’un premier film : une carte blanche limitée, quelques longueurs, une narration parfois redondante. Mais dans l’ensemble, il propose un regard, une sensibilité, et une promesse qui donne forcément envie.

EN DEUX MOTS

Film chinois qui prend son spectateur à contre-pied, pour le plus grand plaisir des amateurs de mélodrame. Ji Zhang signe un premier long-métrage bourré de sensibilité, sublimé par une photographie soignée qui dépeint le décor naturel d’une Chine industrielle en perte de repères et écorchée.

3,5

Note : 3.5 sur 5.


Abonne toi au site !

Ils en parlent également : Benzine, Movierama ou Telerama

(1 commentaire)

Répondre à comitoaryaan1994 Annuler la réponse.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.